Extrait du compte rendu avancé de la Commission des travaux publics, de l'action sociale et
de la santé Mardi 30 mai 2017.
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QUESTION
ORALE DE MME BONNI À M. PRÉVOT, MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS, DE LA SANTÉ, DE
L'ACTION SOCIALE ET DU PATRIMOINE, SUR « L'ACCUEIL DES JEUNES HANDICAPÉS
MENTAUX FRANCAIS EN WALLONIE »
Mme la
Présidente.
- L'ordre du jour appelle la question orale de Mme Bonni à M.
Prévot, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du
Patrimoine, sur « l'accueil des jeunes handicapés mentaux français en Wallonie
». La parole est à Mme Bonni pour poser sa question. Mme Bonni (PS).
-
Monsieur le Ministre, lors de la campagne présidentielle française, les
promesses électorales des candidats n'ont évidemment pas manqué. L'une d'elles
a particulièrement retenu mon attention. Cela d'autant plus qu'aujourd'hui le
candidat qui l'a formulée est devenu président. Emmanuel Macron a en effet
promis de rapatrier les personnes handicapées françaises hébergées en Belgique.
Or, on le
sait, une bonne partie de ces personnes handicapées réside dans des
institutions wallonnes. Selon l'AViQ, on ne dénombrerait pas moins de 6 000
Français hébergés en Wallonie, répartis dans 140 institutions. Cette présence
française s'explique par le manque de places et leur coût beaucoup plus élevé
en France. En effet, dans l'Hexagone, les bénéficiaires doivent être logés dans
des institutions hospitalières, souvent psychiatriques. L'approche belge étant
elle beaucoup plus pédagogique. Si cette mesure semble positive pour les
familles françaises des personnes handicapées, elle aurait inévitablement des
conséquences sur nos institutions wallonnes, en termes d'emploi notamment.
Sans
épiloguer longuement, j'en viens à mes questions. Que pensez-vous de cette
annonce d'Emmanuel Macron ? La France aurait-elle les capacités pour rapatrier
les quelque 6 000 personnes handicapées ? Comment la Wallonie pourra-t-elle
faire face à ce rapatriement à court ou plus long terme ? Mme la Présidente.
- La
parole est à M. le Ministre Prévot. M. Prévot, Ministre des Travaux publics, de
la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine.
- Madame
la Députée, votre question a bien retenu mon attention. Sachez que l'accueil
des personnes handicapées françaises – il s'agit majoritairement d'adultes – en
Wallonie concerne effectivement plus de 6 000 personnes. Un accord de
collaboration existe, depuis 2011, entre la Wallonie et la France quant à cet
accueil. Cet accord a notamment pour objet d'assurer un meilleur accompagnement
et une prise en charge de qualité des personnes handicapées et de favoriser
l'échange et le transfert de connaissances et de bonnes pratiques et le
développement d'outils de collaboration entre autorités françaises et
wallonnes.
Pour
rappel, le coût de la prise en charge, en Wallonie, de personnes handicapées
françaises est assumé par les autorités françaises elles-mêmes. Cela ne coûte
donc pas au budget wallon et cela ne se fait donc pas au détriment de budgets
wallons qui pourraient bénéficier aux personnes handicapées wallonnes.
Concernant
la position de M. le Président Macron, il faut en reconnaître la pleine
légitimité. En effet, tenant compte du choix des familles, il est bien
compréhensible que les autorités françaises, les familles et associations de
familles souhaitent la création de solutions de proximité sur leur territoire
plutôt que d'être contraints de les trouver ailleurs.
Cependant,
il existe également beaucoup de cas où la personne adulte en situation de
handicap est hébergée, depuis parfois des dizaines d'années dans un service
wallon. Pour ces personnes, le souhait des familles est souvent le maintien de
la solution existante, la personne handicapée s'étant créé une vie et tout un
projet dans son établissement. Un rapatriement en France serait probablement
vécu comme un déracinement. L'important dans ce contexte semble donc la
meilleure prise en compte possible du choix des familles et des personnes en
situation de handicap.
La
volonté française de ralentir les flux vers la Wallonie et de proposer des
solutions en interne n'est cependant pas neuve ; elle avait déjà été exprimée
par Mme la Secrétaire d'État, Ségolène Neuville, en charge du Handicap sous le
Gouvernement Hollande, au cours du précédent quinquennat. Des mesures en ce
sens avaient d'ailleurs été annoncées, j'avais pu en débattre avec elle
puisque, après être venue en Wallonie, je m'étais rendu moi-même à son cabinet
à Paris.
La
détection de plus en plus précoce des handicaps, d'une part, et l'allongement
de la vie, d'autre part, font que le nombre de familles en recherche de
solutions ne cesse de croître. En conséquence, à l'heure d'aujourd'hui, de
nombreuses demandes françaises continuent à être adressées à des services
wallons.
D'une
part, en raison de la persistance d'un manque de solution en France malgré les
mesures annoncées. Une chose est de l'annoncer, une autre est de débloquer des
budgets puis d'avoir toutes les procédures administratives pour que cela soit
mis en œuvre et que ce soit, en plus, localisé, de manière appropriée, sur le
territoire de l'Hexagone.
D'autre
part, c'est aussi en raison d'une spécificité de l'accueil en Wallonie, où l'on
reconnaît une méthodologie de prise en charge plus axée sur l'éducatif et
l'accompagnement dans la réalisation de projets de vie globaux pour les
personnes, avec une ouverture à des problématiques très complexes et des
procédures administratives plus simples pour la création de ces solutions, là
où est encore dans une optique fort médicale en France, sont un élément pour
lequel aussi, même s'il devait y avoir des places nouvelles créées, il
continuerait d'y avoir un intérêt pour les projets développés en Wallonie.
Je
préfère aussi mettre l'accent sur l'aspect qualitatif de la prise en charge et
sur l'importance du choix des familles, donc sur l'importance pour les services
de poursuivre leur offre de prise en charge la plus qualitative possible, afin
de faire valoir le savoir-faire wallon concernant les personnes handicapées et
les prises en charge complexes.
Cependant,
pour répondre plus précisément aux questionnements, je ne crois pas qu'il y
ait, pour l'instant, de crainte à avoir pour l'emploi. On restera évidemment
attentifs à la situation et des contacts seront pris dès que je connaîtrai, en
suite du prochain scrutin législatif en France, ce qui sera alors mon homologue
au sein du Gouvernement Édouard-Philippe II probablement.
Sachez en
tout cas que, a priori, le secteur a encore de très beaux jours devant lui tant
les besoins sont immenses à rencontrer et que les annonces aussi positives pour
les Français qui auraient pu être formulées par M. Macron sont légitimes et
compréhensibles, il y aura encore du délai avant qu'elles se concrétisent. Mme
la Présidente.
- La
parole est à Mme Bonni. Mme Bonni (PS).
- Merci,
Monsieur le Ministre.
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