Wolfgang
finit sa maternelle en progressant de manière inouïe. Il était loin le temps où son souci de la propreté, du rangement, ses rituels l'obsédaient ! À l’entrée en primaire, il
retrouva goût à la lecture. Bientôt, nous nous aperçûmes avec l’équipe
éducative que cette école ne lui convenait plus : en effet, elle ne
dispensait d'enseignement qu'à des enfants avec déficience intellectuelle : ses programmes n’étaient
plus adaptés pour lui.
Cependant,
notre fils avait encore beaucoup de difficultés, surtout sur le plan des
relations avec les autres enfants dont il craignait exagérément les attitudes, et
l’on devait poursuivre tous (avec lui, bien sûr) nos efforts pour améliorer
son autonomie. Il restait assez lent
dans l’exécution de certaines tâches. Nous décidâmes donc, orientés par le
centre psycho-médico-social relié à l’école, de l’inscrire dans une autre,
toujours spécialisée, mais qui scolarisait aussi des enfants sans déficience
intellectuelle.
Là
il fit encore d’énormes progrès sur tous les plans : matières scolaires,
mais aussi sur le plan sociétal, la communication… même si, hors matières
scolaires, il continuait à éprouver de grandes difficultés, au bout de quelques mois l’équipe éducative
vit que ses problèmes n’étaient pas insurmontables ni surtout assez importants
pour l’empêcher de participer à une expérience d’inclusion scolaire menée avec
l’école communale voisine ordinaire.
À
la rentrée scolaire de l’année suivante, Wolfgang retourna donc dans l’enseignement
ordinaire… mais avec l’aide du spécialisé. Cette expérience, menée par le
scientifique Philippe Tremblay, consistait à faire collaborer deux écoles, une
ordinaire et une spécialisée, dans un projet de co-enseignement. Dans une
classe de l’enseignement ordinaire, un groupe de 6 à 8 enfants à besoins
éducatifs particuliers est intégré, et deux enseignants, dont l’un est
spécialisé, s’occupent de toute la classe. Les enfants inclus ont en plus un
soutien paramédical.
Ce
fut un épanouissement pour Wolfgang. D’emblée, lui qui restait toujours difficile
pour manger (dans l’école précédente, tous les jours, un professeur devait
rester avec lui après la cantine car il était très lent), il se mit à manger
avec bel appétit. Avec le temps, il se fit de très bons amis.
Ponctuellement, nous étions confrontés à un problème de sensibilité exacerbée, d’inattention ou de réaction problématique, difficultés presque toujours liées
à son syndrome, son propre ressenti ou bien encore des ajustements à effectuer dans
le cadre du dispositif d’inclusion, mais alors nous prenions avec l’équipe
éducative des dispositions pour y remédier. Nous agissions rapidement, car cela
pouvait avoir d’importantes répercussions sur son moral.
Au
fil des années, nous constations des améliorations dans les domaines où il
éprouvait des difficultés : les relations, l’autonomie, le rythme… Ses
bulletins scolaires étaient excellents, il collectionnait les 9, les 10/10…
Aujourd’hui,
l’expérience n’en est plus une et le co-enseignement se poursuit. L’année
prochaine, ce sera la dernière année de primaire pour Wolfgang et toute l’école
sera inclusive, le projet ayant « grandi » avec les enfants, après
avoir débuté par la classe de 1ère année (notre fils l’aura rejoint
en seconde année de primaire).
Il
est important de souligner que cette inclusion bénéficie à tous les enfants, qu’ils
soient en intégration ou pas. Les deux enseignants s’occupant de tous les élèves,
la remédiation à leurs difficultés quelles qu’elles soient, ainsi qu’en amont
le dépistage de ces difficultés, sont si bien assurés qu’aucun enfant dans ces
classes inclusives ne connaît l’échec scolaire, qu’il soit « inclus »
ou « accueillant ».
Cette
histoire vécue nous enseigne donc qu’une faiblesse peut être une force. Et,
pour peu qu’on accepte le partage de cette expérience, elle peut devenir un
exemple pour tous.
Voir
le reportage sur cette inclusion scolaire à partir de 15’50’’.
Après
le primaire, viendra le temps du secondaire. La question est juste de savoir si
Wolfgang aura besoin d’un suivi particulier pour la première année, la délicate
articulation entre le primaire et le secondaire, ou bien s’il pourra déjà « voler
de ses propres ailes »… En tous cas, nous pensons plus à son avenir sous l’angle
de ses études que celui de son handicap, bien que celui-ci fera toujours partie
de lui, à la fois sa faiblesse et sa force. Et que nous devons toujours en
tenir compte afin de ne pas le léser, ni ceux qui feront un bout de chemin,
plus ou moins long, avec lui.
Être
d’abord un enfant, puis un élève, puis un élève à besoins éducatifs
particuliers, c’est le droit de tous nos enfants, quelles que soient leurs
difficultés.
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