mardi 4 janvier 2011

Échec et double, et double échec (1)

Le redoublement

Double interview par Pierre Bouillon, journaliste au Soir, le quotidien belge. La 1ère ici :

Étienne Michel, Directeur général du Secrétariat général de l'enseignement catholique (Segec)

 "Travaillons plutôt en amont"

L'enquête PISA signale que les pays où le redoublement est pratiqué, (Belgique, France, Luxembourg, Portugal, Espagne) ont de mauvais résultats.



Pisa teste les enfants de 15 ans, quelle que soit leur année scolaire. Il est donc logique que le redoublement, en effet beaucoup pratiqué chez nous, ait un effet sur les résultats. Ce serait différent si Pisa testait les élèves d'une année scolaire précise. Avant de réfléchir au redoublement, il faut analyser Pisa. Le résultat en lecture est le signe que nous allons dans la bonne direction. Nous avons quasi rejoint nos pays de référence*, de tradition social-démocratie comme Suède, Finlande, Danemark, Royaume-Uni. La Corée est plus performante? Mais que savons-nous de la Corée ? Notre société peut-elle être valablement comparée à la Corée ?

Et le redoublement ? À bannir ?

Le redoublement est un symptôme, le révélateur d'une difficulté scolaire - il signale que le Conseil de classe a considéré que l'élève ne maîtrise pas les compétences attendues. Maintenant, il faut s'interroger sur la dimension pédagogique du redoublement. Des pédagogues éminents, comme Marcel Crahay (ULg), ont démontré de façon convaincante que le redoublement ne peut être considéré comme un "moyen" pédagogique. Il n'a pas de valeur intrinsèque.

Alors ? Il faut le bannir ?

Travaillons plutôt en amont, sur ce qui explique nos meilleurs résultats à Pisa.

Et quelles sont ces raisons ?

D'abord, il y a une prise de conscience collective - que Pisa n'a fait qu'accélérer - de ce que la lecture est "le" savoir de base, qui conditionne tous les autres. Cette prise de conscience a touché les enseignants, les équipes éducatives à la recherche des meilleures méthodes de lecture, le politique, qui a appelé à recentrer sur les apprentissages de base - c'est le Contrat pour l'école de Marie Arena [NDLuciole : l'ex-ministre de l'enseignement en Belgique]. Et les fédérations de pouvoirs organisateurs, comme la nôtre, qui travaille sur les évaluations externes - on permet à nos écoles de se situer par rapport à la moyenne, par rapport aux écoles proches, par rapport aux écoles qui ont un même type de public scolaire, etc. Voilà : il y a eu une mobilisation générale et le début d'un cercle vertueux. S'il est vrai que le redoublement n'est qu'un symptôme, il ne faut pas agir sur le révélateur mais sur les difficultés qui sont révélées. Travaillons en amont, en développant notamment la remédiation - en classe, et, si hors classe, à l'école.

*[NDLuciole : dans son Communiqué de presse du 8 décembre dernier, la Ligue des droits de l'enfant disait : "Ce mardi, d'aucuns se réjouissaient de la progression de la Belgique dans le classement PISA. Si celui-ci est réjouissant - la Belgique occupe le 11e rang sur 64 pays - il est essentiellement dû aux résultats de la Communauté flamande et, dans une moindre mesure, de la Communauté germanophone. Les quelques progrès que la Communauté française a réalisés en lecture (+14 points) ne doivent pas occulter les difficultés qui s'agrandissent en mathématique et surtout en sciences".

La 2e partie de ce billet sera consacrée à l'interview de JP Coenen, le Président de la Ligue des droits de l'enfant]

2 commentaires:

Mirabelle a dit…

d'humeur noire, j'ai envie d'écrire : des baffes et des baffes ... mais bon plus sérieusement, tu soulèves le problème de la qualité ...ce n'est pas du tout le plan voulu par les élites politiques... l'écrémage commence à l'école maternelle !

Isabelle Resplendino a dit…

Oui, c'est le plan : réserver l'éducation de qualité à la descendance de l'élite...
Je crois quand même que certains s'inquiètent de ce que la France va devenir ainsi un pays en sous-développement... Ils n'auront plus personne à exploiter.